Pierre Perrin, Le sens de l’art
in Les Carnets [inédit]
Un fruit pourrit. Passe l’hiver, revient la fleur. Son successeur est sain.
L’humanité s’apparente peu à un arbre ; on l’élague de moins en moins. Pourtant l’homme contient le germe de la pourriture dès la naissance.
Il tue, tout petit, plus petit que lui et, en grandissant, qu’est-ce qui restreint son appétit ? La guerre grandit les États.
Que chacun se tienne, sinon aux ordres, sans pouvoir, l’aventure reste le quotidien ; vivre, un tableau de chasse. La drogue au biberon, le cul jusqu’au crématoire, telle est la fronde ; le pâturage fait les œillères barbelées !
Ainsi la course emporte des kilomètres d’existence… dans l’abattoir de la conscience.
Sous-marins soi-disant démilitarisés du présent, quelques tisonniers de la langue – les porteurs de feu sont morts – s’obstinent dans l’incohérence assassine. Ils méprisent ce “bas monde”, qu’ils disent, sans guigner la moindre transcendance. Ils écrivent telles des essences. L’émanation de leur absence, rarement troublante, atteste mal leur ombre sur les estrades.
En art, les étincelles impressionnent ; seul demeure le produit de la forge.
Pierre Perrin, Les Carnets, en cours d’écriture