Pierre Perrin : Tragédie du 7 au 11 janvier
Patrick Pelloux, l’urgentiste, a sauvé, non la France, mais Hollande, en le faisant venir, mercredi 7 janvier, sur les lieux de l’attentat, à la rédaction de son hebdo. Le Président, accompagné de son conseiller en communication, a pu débiter à chaud, à deux pas du sang frais, des perles [Onfray, dans le Point]. C’est la liberté d’expression qu’on vient d’assassiner ! Et de proposer “l’union nationale”, que son parti allait ‘manifester’ un peu plus tard, en refusant presque d’emblée un quart des Français. Qu’on imagine un instant que le président ait été Sarkozy à la place de Hollande, y aurait-il eu 4 millions [chiffre officiel] de Français dans la rue ? D’ailleurs, on n’a rien vu de tel à l’issue de l’affaire Merah ! L’indignation, cette fois, a ressoudé la gauche. La liberté d’expression, que 400 textes de lois censurent en France selon Pierrat, valait bien une marche.
Si la tolérance n’était pas un vain mot, ne devrait-on pas inclure les trois terroristes islamistes, Français de plus de trente ans, parmi les victimes ? Leurs crimes sont irréparables, impardonnables. Pourtant, c’est presque impossible à reconnaître, mais certains dans leurs familles ne pourraient-ils pas se dire : ils n’ont pas su s’intégrer. Leur barbarie et leur mort, n’est-ce pas un peu la faute de la France aussi ? Car que des banlieues soient des ghettos où les forces de l’ordre, les pompiers, les médecins ne peuvent plus pénétrer, c’est un visage déjà ancien de la France. Voilà vingt, trente ans que ça empire ! Cette tragédie, à la marge, nous aura appris que 50 tribunaux en Angleterre appliquent la charia. Combien en France ? Le zéro est-il garanti ? Si ces 3 questions s’avèrent intolérables pour la plupart, peuvent-elles rester ignorées ?
Et la laïcité ! Pourquoi donc le Président de notre République ‘laïque’, après cette manif médiatique en diable, a-t-il été donner-en-plus le gage de sa présence à une communauté, en compagnie d’un premier ministre suspect de crimes de guerre ? Cohérence politique ? Fausse note certaine, selon Régis Debré, lundi 12 sur France-Culture, radio qui parle à son tour d’unanimisme à la place d’unanimité ! Quand l’heure est au panurgisme… Mais tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles, disait Pangloss. La pensée est sous contrôle, à défaut de la paix à laquelle chacun devrait prétendre – nous voilà en guerre contre le terrorisme, après d’autres États : Israël, l’après Bush junior, etc… !
S’il fallait une preuve que cette analyse est peut-être dans le vrai dont personne ne veut jamais : un sondage annonce une remontée de huit points pour Hollande et Walls ! [Le premier a peut-être même retrouvé une première dame : Royal qui l’a représenté pour l’enterrement de quatre victimes en Israël ?] Plus sérieusement : la ministre de l’Éducation n’a pas anticipé les réactions des jeunes de banlieues à la minute de silence… Mais quoi ! S’il n’y avait que cela ! Comment vivre sans s’écharper ? C’est la raison d’être de la politique.
[Un sonnet prémonitoire ? écrit en 2003]
Pierre Perrin, ‘Carnets de haut bord’, 14 janvier 2015