Paloma Hidalgo et William Burch ont lu Le Goût de vivre de Pierre Perrin, Possibles Hors-série, 2025
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  • Paloma Hidalgo et William Burch ont lu Le Goût de vivre
    essai de Pierre Perrin, Possibles Hors-série, 2025

    couverture

    Cher Pierre,
    J’ai lu Le Goût de vivre comme un témoignage intellectuel, qui cherche à enrober le lecteur dans une densité qui, loin de se poser en vérité absolue, émerge plutôt dans l’humilité d’une quête constante. La connaissance, à chaque page, ne réside pas dans une réponse définitive, mais dans l’errance, dans ce mouvement même de la pensée qui interroge, remet en question, se renouvelle.
    Il y a, dans ton essai, la trace d’une vérité profondément nietzschéenne : celle où l’homme doit « étreindre le monde », non pour le comprendre, mais pour en extraire un sens, une vision qui se fait toujours dans la lutte. L’interrogation sur la relation entre l’optimisme et l’inéluctable souffrance humaine – qu’il s’agisse de la violence, de l’abandon, de la souillure – le traverse comme une litanie philosophique. Comment être libre dans un monde qui semble nous écraser ? Ta réponse, à l’instar de Nietzsche, n’est pas une fuite vers une utopie, mais une immersion dans la vie elle-même, dans ses ombres et ses lumières. Ce n’est pas la quête d’un idéal que tu proposes, mais la confrontation aux limites de l’existence humaine.
    C’est dans pareille lumière de la critique intellectuelle, d’une profondeur douloureuse, que ton livre devient plus qu’un simple document sur la condition humaine. Plutôt : une invitation à une réflexion radicale sur notre manière de vivre, d’aimer, de croire et de créer. 
    Ce “doute”, cette “critique intellectuelle”, m’évoque fortement la phénoménologie : quête de l’expérience vécue, telle une immersion dans la subjectivité et la temporalité de l’être ; la souffrance non comme adversité à fuir, mais comme un point d’entrée vers une compréhension plus profonde de soi et du monde. 
    J’ai été particulièrement touchée par ce côté paradoxal, tragique – profondément vivant. C’est un acte de déconstruction permanente, d’ouverture à ce qui échappe, qui n’a de cesse de nous réinterroger sur notre jouissance.
    Merci. 
    Avec le cœur,

    Paloma Hidalgo, courriel, 20 avril 25


    Pierre Perrin lance : « Un écrivain qui ne grince, ni ne cogne n’est qu’un charlatan ». Tout au long de son essai, l’auteur grince et cogne en effet. « Le noir l’emporte. » Sa vision de l’avenir paraîtra sombre à certains, lucide à d’autres. Son livre nous emporte dans une tempête d’érudition et aussi de bon sens. Perrin nous explique notamment que nous sommes à jamais façonnés par le « morceau de pays où nous avons grandi » et que nous sommes modelés par la langue de notre enfance. Le franco-américain que je suis, dont la langue maternelle est le français et qui a ressenti ses premières sensations au bord du Loiret, au cœur des forêts de Sologne, ne peut que lui donner raison.
    L’identité morale, artistique, culturelle de Pierre Perrin est celle d’un Grec de l’Antiquité. Il écrit des Hellènes : « Ils plaçaient la beauté au-dessus de tout, ils l’adoraient. » Et ce sont bien les multiples agressions actuelles commises contre la beauté qui accablent l’auteur. Il tonne contre les mensonges, les escroqueries, les hypocrisies, dont les critiques, « penseurs » et médias contemporains s’enivrent.
    Pierre Perrin dénonce également la ruine de l’enseignement, l’abrutissement des élèves, l’égalitarisme et la « révolutionite », qui n’aboutissent qu’aux massacres et au néant. Perrin est un humaniste. Son essai dresse un acte d’accusation contre les fausses valeurs, qui empoisonnent notre époque, les réseaux sociaux qui créent de « petits Spartacus », les mauvais poètes, aussi, qui éloignent les lecteurs de la poésie.
    Il fustige encore la destruction de la nature et le mépris voué aux paysans. « Le respect l’emportait pour tout ce qui nourrissait la vie. » Le style de ce Goût de vivre est celui d’un pamphlet poétique. « Le poème s’apparente à un souffle de vie, la vie entière emplit ce souffle. » Or, il s’agit pour Pierre Perrin de célébrer la vie, même si la mort nous guette impitoyablement. Il ne veut pas être dupe des religions, des idéologies, des propagandes, ni du culte du progrès scientifique. Il continue d’écrire pour « faire jaillir la lumière ». Pari réussi, voici un livre qui alerte et ravira les non-conformistes. Merci à l’auteur de nous dévoiler un peu de son âme.

    William Burch, fichier transmis par courriel, 21 avril 2025

    Retour de lecture de Jacqueline Fischer, 28 avril 2025 —>

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