Pierre Perrin, Des jours de pleine terre, Al Manar
Une lecture de Philippe Leuckx, le 30 octobre 2022
Quelle âpreté dans ces poèmes qui de l’enfance à aujourd’hui consignent les blessures et les apprentissages d’un enfant, d’un poète, apte à saisir à pleins mots la violence des apprentissages. Les images tombent comme des constats cinglants, pas une trace de sentimentalisme ni d’once de complaisance. C’est « l’odeur d’urine », c’est le « saccage », l’enfant « brûle sans feu », « la nuit ravale l’orgueil de l’enfant que nul n’écoute ». La mère n’étreint jamais le petit.
Construit en cinq sections – autant d’étapes d’une vie, le livre choisit une écriture qui puisse au mieux traduire les états d’âme, les sentiments, les effusions, toute émotion née dans le flux des jours, en campagne, dans l’usage de la terre et des bêtes, à l’aune des saisons, au rythme des plaisirs, des peines, des découvertes. L’amour y a une place de choix et les nombreux poèmes adressés à l’aimée disent assez cette période faste où la rencontre a renvoyé bien loin derrière les traumas. L’écriture, en effet, privilégie les poèmes longs, fortement charpentés, aux images lyriques et à la scansion sûre des classiques :
- Des jours de pleine terre, Al Manar, octobre 2022, le recueil, les lectures, etc.
- La présentation du volume chez l’éditeur
- Une page récapitulative des principaux retours, articles, dossiers et signatures
- Une lecture par Pierrick de Chermont
- La lecture du dossier Pierre Perrin dans Poésie/première n° 86 par Jeanne Orient
- Réalisé par Isabelle Lévesque, un entretien pour Terre à ciel, juillet 2023
- Cinq retours de Jean-Pierre Georges, Emmanuel Godo, Fabienne Schmitt, Jacqueline Saint-Jean et Raymond Perrin
- Un dossier [article et entretien], dans la revue Livr’arbitres n° 41, mars 2023
- Un article d’Olivier Stroh, sur sa page Lettres, 26 mars 2023
- Les hautes terres de Pierre Perrin, par André Ughetto [12 mars 2023]
- Un article par Alain Roussel sur le site En attendant Nadeau, 8 mars 2023
- Une étude d’Emmanuelle Caminade, pour L’Or des livres, le 26 févier 2023
- Article de Ridha Bourkhis dans La Presse de Tunisie, le 23 février 2023
- Poème Hommage à René Char lu par Pierre Perrin [vidéo 1,31 mn]
- Courriel de Philippe Colmant, 7 février 2023 et courrier de J. M. Sourdillon
- Article de Daniel Guénette sur son blog québecois le 31 janvier 2023
- Courriel de René de Ceccatty, lettre de Michel Leuba et article d’Alain Nouvel sur RAP
- Jeanne Orient, texte et présentation vidéo de 6 mn 10, 19 janvier 2023
- ‘L’atelier’ lu par Marilyne Bertoncini [vidéo de 1 mn 50]
- ‘Force de l’ignorance’ lu par Catherine Humbert [vidéo de 2 mn 23]
- Jacques Morin, article pour revue Décharge, 27 décembre 2022
- Marie-Thérèse Peyrin, Le Livre des visages, 5 décembre 2022
- Retours de Virginie Megglé, d’Émile Eymard, Danièle Corre, Milouine, Marie Desvignes et Jean-Claude Martin, nov-déc. 2022
- Un choix de six poèmes par Georges Guillain, le 13 nov. 2022
- Une lecture de Georges Guillain, le 10 novembre 2022
- Une lecture de Didier Pobel, le 5 novembre 2022
- Une lecture de Gérard Mottet, le 31 octobre 2022
- Une lecture de Philippe Leuckx, le 30 octobre 2022
- Pierre Perrin, Envoi pour Des jours de pleine terre
- P. P. Éloge de la poésie [et comment je suis venu à elle]
Dans l’habitat toujours précaire de l’impossible, il refuse
La défaite. Sans révélation à tenir, contre toute attente,
Sa relecture lui ouvre les yeux et le transporte
De l’insuffisance qui le mine vers le but à atteindre. (p.53)
Elle a le goût d’ouvrir les bras pour susciter la plénitude.
Si son sourire – arc au repos, de rose sur la neige – paraît
Assassiné d’absence quelquefois, un baiser la fait vibrer.
Au chevet, rien ne surpasse le silence ameuté de ses seins. (p.85)
Le quatrain offre au poème une respiration ample, celle de la terre qui mûrit, celle des émotions qui submergent et prennent le temps d’être contées.
Le poète, « nourri d’inquiètes certitudes », sait nommer les joies comme les ombres, les « embellies » comme « au secret la solitude ». Dans cette quête, où l’autobiographie corsetée se fait jour, la recherche de la vérité sur le « qu’est-ce que vivre ? » martèle nombre de passages, puisque les « ruines perdurent, nous versons ».
Avec l’âge, les préoccupations littéraires et la sagesse qui va l’amble, le poète peut servir de longs éloges de la poésie, de sa terre natale, et, référence au fameux livre sur la « mère » tenter d’en finir avec la douleur : « La nuit, parfois, tu viens, désolée, ombre de ton ombre maigre et sèche. / Je souffre encore de n’avoir pas cueilli ton dernier souffle sur mes lèvres », « salut » ultime à la génitrice austère et sévère.
On sort du livre, à la fois ému, retourné par la maîtrise des thèmes et du style – romain par l’exigence et le rythme qui sait si bien scander l’émotion retenue.
Philippe Leuckx, écrivain et critique littéraire belge