Marie-Christine Guidon lit Une mère, le Cri retenu, Cherche Midi 2001
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  • Échos à Une mère, le Cri retenu
    Par Marie-Christine Guidon, in Florilège n° 189, décembre 2022

    couv. Une mère, chez l’éditeur

    Ce livre, paru tout d’abord en 2001, vient d’être réédité en 2022 et nous offre l’opportunité de faire un voyage introspectif avec Pierre Perrin, poète, romancier et critique littéraire.
    L’auteur vient chercher sur la rugosité de la page blanche une terre d’asile pour accueillir sa douleur incommensurable et réponses aux questions suspendues dans les méandres du temps, là où le mutisme maternel prend ses aises. « je reste le cœur dévoré d’incertitudes ». La mère disparue et pourtant si présente, occupe tout l’espace, d’un silence pesant. Au fil des pages, Pierre Perrin va gratter du bout des doigts, à s’en écorcher, la terre natale pour exhumer un souffle de vie car « Le voile de l’oubli pèse plus qu’un linceul »…« au-delà des dahlias hauts comme des flammes », il faut écarter tout ce qui peut brûler la moindre parcelle d’espérance.


    Emprunter le chemin à l’envers et retrouver le « chien trop aimé », devenu complice de jeu, cet animal, frère de misère, abattu d’un coup de hache, ce qui assènera un traumatisme irréversible à l’enfant de dix ans « puisqu’il faut compter les dépenses au centime près ». Se demander si l’embrasement des étés de l’adolescence permet d’apaiser les incandescences qui vous réduisent en cendres si vous n’y prenez garde. D’une lucidité criante, l’interrogation surgit : le temps nous réduit-il à l’impuissance des regrets « Le temps, c’est Attila – au galop et au repos ».
    L’éveil se fraie un chemin de hasard dans les labyrinthes d’un parcours parfois chaotique et notre approche s’en trouve chahutée. D’un bois tendre, il faut tenter, bon gré, mal gré d’accepter les blessures gravées sur l’écorce de notre vie « Maman permets-moi de te comprendre, par-delà ta mort ». La vie rude et laborieuse du monde rural ne laisse pas de place aux élans de tendresse maternelle. Dans sa quête éperdue, l’auteur ébauche inlassablement des étreintes qui se dérobent, mirages de papier, « La vie se passe à appeler un bonheur qui recule à mesure qu’on l’approche ». Il fouille la cicatrice de son enfance, restée béante, pour recoudre avec les fils du passé et du présent, ce qui peut être « réparé » « Du plus loin que je me souvienne, j’attendais d’être aimé ».
    Avec ce « cri retenu », Pierre Perrin nous fait pénétrer son intimité et ses déchirements aux accents de confession. Même si « la littérature… ne peut rien contre la mort » «  l’amour est presque aussi fort que la mort ». La virtuosité du verbe, telle une corde tendue, confère une valeur holistique à cet ouvrage bouleversant qui vient bousculer les certitudes les plus « encrées ».

    Marie-Christine Guidon, in Florilège n° 189, décembre 2022

    « Splendide. Tout ce qu’il y avait à dire, me semble t il, y est. Ce livre est bouleversant.
    Bouleversant de vérité pudique et entière, profonde, à la fois. Une écriture comme on n’en fait pas. » — Marie-José Eychenne, Le Livre des visages, commentaire le 13 décembre 2022

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