Une mère le cri retenu, lecture de Marie-Françoise Godey
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  • Une mère, le cri retenu
    récit, éditions Cherhe midi, 2001
    lecture de Marie-Françoise Godey


    couv. Une mère, chez l’éditeur      Le cri retenu, c’est celui de l’enfant, de chaque enfant difficile, égoïste, insolent, entêté, parce qu’il se croit indésirable. « Du plus loin que je me souvienne, j’attendais d’être aimé. Nul élan de ma mère, sinon pour me repousser. »
          Le cri retenu, c’est celui de la mère, de chaque mère qui met ses propres désirs en retrait pour élever son ou ses enfants. D’anciennes lettres attestent qu’elle a été sensible, aimante. Sa nostalgie, elle la cache sous une carapace de mépris envers le père, de dureté, d’intransigeance envers le fils : « Elle m’intimait l’ordre d’exceller. » Elle se réfugie du matin au soir dans ses occupations, acharnée à « tenir la maison, le jardin, la basse-cour, l’éducation de son fils. » Ce travail sans répit ne laisse pas à ces êtres fiers ou trop pudiques, peu enclins à se confier, à s’épancher, le loisir de communiquer.


          De bonheur partagé, il est peu question dans ce récit autobiographique. Quelques moments de connivence avec le père, un chien recueilli, l’une ou l’autre après-midi passée à jouer près de la mère plutôt qu’avec des camarades, et ce, dans le mutisme. Pas de quoi faire, pour l’auteur, de son enfance, un paradis. Car les parents, on l’a compris, ne s’entendent plus : « Impuissant, j’ai assisté toute mon enfance à leurs déchirements. »
          Le cri retenu, c’est celui que l’auteur voudrait qu’enfin sa mère entende à travers ces pages où il se livre, où il la livre, sans fard. Déplorant de lui avoir manqué, essayant après bien des années de la comprendre, de s’approcher par bribes de son secret emporté dans la tombe. Ces pages, il les écrit comme une confession : « L’admiration qu’elle méritait ne montait pas vers elle. […] je t’ai martyrisée sans y penser, sans réaliser que ton cancer m’était dû. » De nature peu portée au rire, il le fait avec sérieux, sans une pointe d’humour, sans même de dérision, avec seulement le mince espoir qu’il en reste un peu de l’âme de sa mère.
          C’est avec regret qu’il lui crie : « C’est trop tard, irrémédiablement, voilà que je t’aime. »

    Marie-Françoise Godey [voir son site]


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