Rencontre à Luxeuil autour du Modèle oublié, Robert Laffont, 2019
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  • Au Café littéraire de Marie-Françoise à Luxeuil
    à propos du Modèle oublié, éditions Robert Laffont, avril 2019

    Le Modèle oublié [couverture]L’écrivain et critique littéraire Pierre Perrin de Chassagne-Saint-Denis, à quelques kilomètres d’Ornans où Gustave Courbet a vécu, s’exprimait hier pour Le Café littéraire. Son dernier roman, Le modèle oublié, est paru aux éditions Robert Laffont dans la collection « Les Passe-Murailles » pour le bicentenaire de la naissance du peintre. Le Modèle oublié à la couverture magnifiquement illustrée de la partie centrale de la toile de Courbet, L’atelier du peintre, dans sa version restaurée et lumineuse, est un ouvrage qui donne à connaître les aspects méconnus de l’artiste en tant qu’homme, à travers, entre autres, ses amours et ses toiles. Pour l’occasion, les locaux où avait lieu la rencontre étaient ornés d’un certain nombre de reproductions couleur qui illustrèrent bien des propos de l’auteur.
    Pierre Perrin, en fin pédagogue (né en 1950, il fut aussi professeur de français en classes de lycées), plutôt que de mener une conférence figée, prit le parti de développer à bâtons rompus, au gré des questionnements du public (parmi lequel bon nombre de personnes avaient lu son livre en amont), les amours du peintre et de Virginie Binet, modèle avec qui Courbet vécut une dizaine d’années.  Pierre Perrin s’étendit sur la personnalité, le parcours de Gustave, sa réelle situation financière, ses rapports avec ses contemporains : Baudelaire, Flaubert, Proudhon, Champfleury, Gautier, Victor Hugo, etc. « Le contexte des années 1840 à 1877, où se passe le roman, présente bien des analogies avec celui d’aujourd’hui », souligna une lectrice. Fut abordée aussi la question de la conservation des documents concernant le peintre, et celle de ses œuvres. « La technique picturale de l’époque sur toile goudronnée fait au fil du temps remonter le goudron et assombrir les couleurs », expliqua une autre également artiste peintre.
    Roman ? Biographie ? Essai ? Il y eut débat quant à la qualification de « roman » inscrit sur la couverture du livre. C’est cette qualification de roman, et non une raison financière, qui fit exclure la reproduction de toiles en encart dans le livre.


    Pierre Perrin dévoila la manière dont il élabora son roman. Recherches sur le net (aidé de Christine son épouse qui d’ailleurs l’accompagnait pour cette rencontre avec les lecteurs de Luxeuil), et déplacements, jusqu’à Dieppe dont était originaire Virginie. Puis écriture au présent de narration, puisque passé simple et imparfait ne sont plus guère maîtrisés ni au goût du jour, en y incluant nombre de faits avérés et textes issus de documents d’époque. Mais en y faisant également entrer une grande part d’intuition et d’imagination personnelle quant à des éléments ou situations qui lui paraissent avoir pu vraisemblablement se produire. L’éditrice indique, en page 3 du livre, que la collection « Les Passe-Murailles […] accueille des romans ou récits à cheval entre rêve et réalité ». 
    Par l’intermédiaire de cet ouvrage, Pierre Perrin veut rendre à Virginie et au fils qu’elle donna au peintre leur véritable place. Il y montre la dualité de Courbet avide de célébrité et de laisser à la postérité une œuvre, plutôt qu’un fils. Fils que pourtant il aimait et pleura mais qu’il n’a jamais voulu reconnaître : « On ne survit que par ses œuvres et les hommes non arrivés par leur progéniture », écrivit-il à proudhon. L’auteur du Modèle oublié nous donne une vision plus juste que celle que l’on connaît habituellement de Courbet, sans flatterie. Bref, l’après-midi fut instructive pour un public ravi avec un Pierre Perrin intarissable, généreux de son temps et de ses explications claires qu’aucun ne se lassait d’écouter.

    Marie-Françoise [voir son site], 27 mai 2019

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